L’article ci-dessous est extrait du site de l’association régionale IFY Loire Océan et reproduit avec l’aimable autorisation de celle-ci.
« En quelle langue avez-vous chanté ? Qu’est-ce que le sanskrit ? Ces deux questions reviennent souvent aux au oreilles des professeurs de yoga qui récitent à leurs élèves le Yoga Sutra de Patanjali ou leur chantent des textes védiques et mantras. Eclairage sur la langue « des dieux ».
Un peu d’histoire.
Le Sanskrit est une langue qui remonte à la haute antiquité et a été une des langues principales de l’Orient, notamment en Inde. C’est la plus ancienne langue de l’Inde. Le premier « document » écrit remonte au XIV avant J.C : le Veda, ensemble de textes et d’hymnes religieux, monument littéraire d’une immense richesse. Auparavant la tradition était surtout orale.
Impossible de parler du Sanskrit sans parler de Panini, le grand grammairien historique (entre IVème et VI siècle avant J.C) pour qui le sanskrit était la langue universelle, de toute l’humanité, sacrée entre toutes car transmise par les dieux eux-mêmes. Plus tard, le mythe attribue à Patanjali que les pratiquants de yoga connaissent bien, la transmission de la grammaire pour que les hommes se comprennent mieux. Plus proche de nous : «La langue sanskrite, quelque ancienne qu’elle puisse être, est d’une étonnante structure ; plus complète que le grec, plus riche que le latin, elle l’emporte, par son raffinement exquis, sur l’une et l’autre de ces langues, tout en ayant avec elles, tant dans les racines de mots que dans les formes grammaticales, une affinité trop forte pour qu’elle puisse être le produit d’un hasard.» déclarait William Jones, orientaliste du XVIII ème siècle.
De nos jours c’est une langue réservée au culte et à l’enseignement, bien que faisant partie des langues officielles indiennes.
Un peu de grammaire.
Saṃ-skṛtá (« parfait » ou, plus exactement, « fait ensemble ») signifie « la langue parfaite, parachevée ». Le sanskrit était utilisée dans toutes les régions de l’Inde et de nombreux textes védiques furent écrits en différentes écritures (sârâda, bangâlî, kannada…). L’usage de l’alphabet denâgarî employé aujourd’hui est dû aux colons anglais. Nâgâri est un mot dérivé de « brâhmi », « deva » dieu : l’écriture de Brahma (le dieu de la création). Cette langue était parlée surtout par les brahmanes (les religieux) en raison de sa complexité. La tradition orale permettait d’en garder le secret du sens entier, ésotérique et réservé à l’élite des disciples. N’oublions pas que le sens définitif d’un texte n’existe pas dans la tradition hindoue, il s’apprend par cœur par répétitions, il se médite et s’éclaircit peu à peu (exemple des Yoga Sutra).
Alphabet devanâgâri : La position de la langue pour la prononciation des lettres est très importante et d’une grande diversité (gutturale, palatale, cérébrale….sourdes ou sonores…non aspirée, aspirée…). Pour articuler correctement le sanskrit il faut donc bien ouvrir la bouche (regarder votre professeur quand il chante, c’est très instructif).
Ce langage composé de sons racines, est enrichi par des suffixes et préfixes qui permettent une grande créativité de sens et de mots suivant leur contexte. Des noms composés s’ajoutent les uns aux autres : un composé sert de base à un autre composé. C’est une langue précise avec une grammaire très codifiée. Le sanskrit comporte une telle quantité de mots simples et composés à deux ou trois termes qu’un dictionnaire commencé en 1939 n’était pas encore achevé à la fin du XXème siècle : dictionnaire d’au moins 100 000 pages, avec des millions de termes !
C’est la langue qui a la littérature la plus abondante du monde…
Beaucoup de persévérance.
Voulez-vous apprendre le sanskrit ?
Il vous faudra une grande patience et persévérance si vous souhaitez l’apprendre comme un « pandit », érudit indien, dans le détail et la complexité de la structure. Vous pouvez vous inscrire à une université qui l’enseigne, commander une méthode sur internet, potasser les livres de grammaire… C’est l’aventure de plusieurs années d’un travail intense.
Voulez-vous être « imprégné » par le sanskrit ? Il vous suffit de répéter avec application les mots du texte ou de la formule (mantra) ou du yoga sutra, transmis par votre professeur. Au début, c’est une mixture assurée ! Ne vous découragez pas : une bonne stratégie est de répéter ce que vous avez compris, même un balbutiement. Vous allez approprier un mot, puis un autre, puis une « phrase »… et au bout du compte le sanskrit s’imprégnera dans votre mémoire, par « cœur ». Ce que vous aurez appris ainsi restera gravé dans votre mémoire comme dans un roc. Jouez le jeu, ne demandez pas tout de suite le texte écrit : l’écriture ne correspond pas toujours à la façon de prononcer et cela risque de vous décourager. Vous pouvez également « contempler » les mots sanskrits, sans chercher leur sens, observer les racines des mots (le plus intéressant à apprendre) et la construction grammaticale. Peu à peu, quelque chose se passera dans votre compréhension. Laissez vous imprégner par le sanskrit, par la vibration que cette langue majestueuse porte en elle. Faites vous confiance, méditez sur les yoga sutra I.12 et I.13 et pratiquez !
Pour aller plus loin :
- « Eléments de grammaire sanskrite – la langue des dieux /
- « Vasundhara Filliozat (Agamat)
- « Grammaire du sanskrit » Jean Varenne (Que sais-je ?)
- Site de traduction devâgâri-anglais : http://spokensanskrit.de «
Agnès MORICONI, Professeur IFY