Un désir d’équanimité

Lorsque j’ai commencé la méditation et le yoga, j’entendais parler d’équanimité. Cela me fascinait et est sans doute à l’origine de ma recherche en yoga. J’en avais compris quelque chose comme « Une stabilité émotionnelle, pas de réaction face aux événements de la vie ». Waouh ! le rêve ! Ça existe donc ? C’est possible ? Je vais pouvoir être libéré de tous les émois qui m’habitent ? J’en rêvais tellement, ne plus souffrir, être calme, apaisé. C’est ça qui m’a mis en chemin, la recherche d’une paix intérieure qui serait synonyme d’équanimité.

Sage comme une image d’Epinal

Cette image de l’ascète assis en méditation, dans un calme absolu me fascinait. Même si j’ai vite compris qu’il y avait là un truc un peu inaccessible… Cependant j’ai continué. Je me suis accroché même si j’ai, par moments, décroché. Ce qui ne m’avait pas été dit quand j’ai commencé ce chemin de yoga c’est que j’allais traverser des périodes parfois difficiles. Difficile d’aller sur le tapis, difficile de rester sur le tapis, difficile d’étudier les textes, difficile de rendre un mémoire durant mes formations, difficile d’apprendre à guider une séance, difficile d’être au rendez-vous… Que certaines fois en sortant de ma pratique, je suis très loin du type calme et tranquille de l’image d’Épinal. On ne m’avait pas dit ou alors je n’avais pas entendu que ce serait si dur. Que j’aurai à traverser des moments de flottement, de doute, de rejet même… Non, on ne me l’avait pas dit… Je ne voyais que l’image d’Epinal et j’aurai bien voulu pratiquer un peu et ensuite être ce type calme qui est sur la photo.
Il aura fallu dépasser l’image d’Epinal pour se coltiner le réel et s’y résigner. Car, ça n’est pas écrit dans le Yoga-sûtra que ce chemin est loin d’être un long fleuve tranquille, que j’allais résister au point de parfois trouver autre chose à faire que ma pratique. Malgré tout cela, je suis convaincu que ce qui m’aura fait tenir, continuer, c’est la relation à mon enseignante, ses encouragements, et la confiance dans la relation que nous avons. Savoir qu’elle sera là si j’ai besoin de lui parler me permet de poursuivre sur le chemin. Cela ne m’empêche pas de douter ou de résister, mais j’y retourne à ce tapis et je pratique avec confiance même si, parfois, elle me donne des pratiques que je n’ai pas du tout envie de faire.
Heureusement ça n’est pas tout le temps difficile, parfois seulement. Souvent, on ressort de sa pratique calme et tranquille avec une grande énergie. Heureusement !

Ne pas rester en surface

Avancer sur son chemin de yoga, c’est dépasser les résistances. Car, il y a mille façons de ne pas se coltiner à soi-même. Ne pas pratiquer avec régularité en est une. Changer de technique, passer du yoga à autre chose en est une autre. Certains arrêtent en cours de formation, d’autres changent d’école. Certains n’ont pas de professeur, ce qui permet de ne faire que ce qu’on aime… Peu importe nos évitements, si c’est pour rester à la surface des choses, autant passer son chemin.

Se mettre au travail

Ce que nous dit le yoga c’est de nous mettre au travail d’un seul principe, et ce, guidé par son professeur. Ce travail est parfois loin d’être une méditation tranquille. Cette mise au travail demande un effort et ça c’est tapas, le premier pilier du kriya-yoga. Cette mise au travail par la pratique des postures, des pranayamas et des méditations, n’est que le début. Le second pilier, c’est étudier et s’étudier. La pratique permet la connaissance de soi, c’est inévitable. Pratiquer le yoga nous confronte à nos limites, nos peurs, nos doutes… Se confronter à cette connaissance, issue du tapis. Comme dit Michel Alibert, il faut « se coltiner le tapis ». Mais il faut aussi, se coltiner les textes et le travail intérieur qu’ils créent en miroir. Se coltiner aux retours de son professeur et aux retours de la méditation. Certaines assises peuvent être des épreuves. Et il faudra en passer par là plus d’une fois. Le troisième pilier du kriya-yoga est le lâcher-prise. Il y aura forcément des choses à lâcher sur le parcours. Des personnes à ne plus fréquenter, des habitudes à changer… Il faudra aussi ne rien en faire de tout ça. Ne pas instrumentaliser sa pratique de yoga et ses effets. Les bouddhistes disent que, si on croise un Bouddha, il faut le tuer, moi je vous dis que si vous croisez le prof de yoga idéal, fuyez… Ne rien faire de son ascèse, de la connaissance de soi qui en découle, là encore c’est un tapas.
Le kriya-yoga est un axe de travail pour nous tous. Ça n’est pas pour rien que ces trois signaux balisent le chemin du pratiquant. Tout est ascèse : la pratique, l’étude des textes et de soi, le lâcher-prise. Si avec ça on n’atteint pas l’équanimité à quoi ça sert je vous le demande…

Vous trouverez un fichier PDF ici qui vous permettra de pratiquer la séance que Philippe Le Masson a guidée lors de la rencontre avec les professeurs de l’IFY qui précédait notre Assemblée générale. Je vous laisse la découvrir.

Auteur : Philippe Le Masson, Formateur IFY